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5 décembre 2011 1 05 /12 /décembre /2011 23:52

"Je pense donc je suis", affirmait Descartes. Les dernières avancées de la science ont montré que mieux ressentir, c’est aussi mieux penser.

La raison d’un côté, les émotions de l’autre. Au mieux, il s’agit d’une paisible cohabitation : connectées à nos sensations, les émotions nous permettent de ressentir de la joie face à la beauté d’un paysage, par exemple, tandis que la raison se charge des facultés cognitives dites «supérieures» (abstraction, intellect, déduction, raisonnement…). Au pire, les relations sont orageuses, les émotions brouillant la lucidité et entravant la prise de décision. Dans les deux cas, les territoires sont bien distincts. C’est sur cette idée tenace que s’est construite notre civilisation occidentale.

Fantasme rationaliste

Le divorce entre les deux hémisphères de notre cerveau est en effet de l’histoire ancienne. Pour Platon déjà, les passions étaient le signe de la démesure, voire de la folie. La culture judéo-chrétienne renforce cette conception qui trouve, au 17ème siècle, un avocat de choix en la personne de René Descartes. Pour le philosophe et mathématicien français, l’homme doit s’appuyer sur la raison seule pour comprendre le monde : «Je pense donc je suis», et non «Je ressens donc je suis».

«Ce fantasme rationaliste a été conforté par les tragédies du 20ème siècle, analyse Michel Lacroix, auteur de "Se réaliser. Petite philosophie de l’épanouissement personnel" (Marabout). Les totalitarismes allemand et italien, notamment, ont su exacerber et exploiter les passions les plus primaires des foules, avec les conséquences que l’on sait.» Ce sont les neurosciences – l’étude scientifique du système nerveux – qui, il y a une cinquantaine d’années seulement, ont remis en cause la traditionnelle séparation établie entre raison et émotions.

Dialogue permanent

En 1994, Antonio Damasio, professeur de psychologie et de neurologie à l’université de Californie du Sud, lance un pavé dans la mare avec un livre au titre provocateur : «L’Erreur de Descartes». En étudiant des patients incapables de ressentir certaines émotions après des lésions cérébrales, le chercheur constate qu’il leur est également impossible de prendre des décisions rationnelles. «Sans émotions, nos raisonnements sont biaisés et nos choix les plus simples peuvent déboucher sur des décisions aberrantes», conclut-il.

Une affirmation qui se fonde sur une observation minutieuse du fonctionnement du cerveau : le cortex, siège de la raison, et le tronc cérébral, centre névralgique des émotions, sont en dialogue permanent. Le cortex nous confère des capacités de mémoire, de raisonnement et de langage. Le tronc cérébral nous permet de faire exactement les mêmes choses, mais à un niveau plus simple, plus basique.

Les observations de Damasio fournissent une base scientifique à un concept apparu au même moment chez les spécialistes du management et du développement personnel : l’intelligence émotionnelle. Développée par le psychologue américain Daniel Goleman, cette notion réconcilie, elle aussi, raison et émotions, en insistant sur le fait que les capacités intellectuelles ne suffisent pas à mesurer l’intelligence : celle-ci dépend non seulement de notre faculté à comprendre les situations mais aussi de notre aptitude à les ressentir. Une nouvelle mesure de l’intelligence – le quotient émotionnel – vient compléter le quotient intellectuel.

Voile et gouvernail

Dans les entreprises, les émotions ont maintenant leur place. Rares sont les DRH qui négligent cette composante de la personnalité. Les grandes écoles de commerce et de management l’ont d’ailleurs prise en compte dans leurs cursus. Dominique Roux, le directeur du magistère de sciences de gestion à l’université Paris-Dauphine, vient ainsi de signer un partenariat avec la Comédie-Française.
«Les artistes et leur vision du monde ont beaucoup à nous apprendre», reconnaît-il. Ses étudiants assistent aux répétitions et aux spectacles du comédien Bruno Raffaelli, puis discutent de la pièce avec l’artiste. Une option notée qui permet aux élèves de développer leurs émotions dites sociales, notamment la confiance en soi et l’ouverture aux autres.

Même dans les sciences «dures», où la logique et la rationalité sont reines, plus personne ne conteste que nombre de grandes découvertes ont eu pour origine des émotions violentes telles que des obsessions, des coups de cœur ou des angoisses. «Einstein faisait des rêves semi-éveillé durant lesquels il s’imaginait tomber en chute libre : les prémisses de sa théorie de la relativité», raconte le physicien Etienne Klein, directeur de recherches au Commissariat à l’énergie atomique. Ce qui ne signifie pas faire fi des capacités de raisonnement. «La science est comparable à un bateau qui utiliserait l’imagination comme voile et la raison comme gouvernail», précise Etienne Klein.

L’Eglise, longtemps dans une posture plus que méfiante vis-à-vis des débordements de l’âme, a à son tour nuancé sa position. «Nous étions peut-être trop cérébraux, confie monseigneur Bernard Podvin, président de la Conférence des évêques de France. Les émotions doivent être replacées à une juste place : il ne faut ni les mépriser ni se laisser submerger par elles.»

Pécher par excès

Que de chemin parcouru depuis Descartes ! Les émotions sont désormais reconnues comme les véritables leviers de la pensée. Est-ce leur accorder trop d’importance ? «Le rationalisme a péché par excès, il ne faudrait pas qu’on entre dans une ère d’"émotionalisme", avertit Michel Lacroix. La publicité, les médias font constamment appel à nos pulsions, provoquant accoutumance et lassitude.» Il serait dommage, en effet, que trop d’émotion finisse par tuer l’émotion.

De Virginie Riva
Article tiré de « Capital.fr » du 19/05/2011


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commentaires

O
<br /> ouais, ils ont tellement bien pensé, qu'ils ont mis des dictateurs en place pour voir ce qu'il en sortirait, (guerres=profits) ça marchait au début, les hitler, mussolinis... mais ça ne dura pas,<br /> alors on à remplacer ces monstres et leurs propagandes qui ne passaient pas aux yeux des populations, par des pubs, et des dirigeants obéissant et corrompus, et ça à marché, les gens ont tout de<br /> suite acceptés, ils en ont redemander, on à jouer sur leurs envies et leurs émotions. Du confort en boite, et tout le monde en veut, en fin de compte, les industriels tuent plus de monde par ans<br /> que les dictateurs dans leurs vies, mais c'est tellement subtil, que l'on en redemande et l'on paye pour que l'on nous tue à petit feu.(médocs qui rendent encore plus malade, et qui tuent,<br /> industrie et nucléaire qui assassine les enfants, et j'en passe et des meilleurs) évitons de regarder les chiffres, on en serait malades. Jouer avec les émotions pour se remplir les poches à<br /> n'importe quel prix.<br /> <br /> <br /> D'après plusieurs études menées par d'éminents scientifiques, nous avons réussit à enclencher la sixième extinction de masse sur terre, et tout ça en un temps record, on peut être fier, on est<br /> les instruments de notre propre destruction ! Qui d'autre peut se vanter d'avoir exterminer toute une planète, non, on est très fort !<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
M
<br /> <br /> Punaise, ça c'est du com  <br /> <br /> <br /> Je suis assez d'accord avec ce que tu écris mais je n'arrive pas à me révolter contre cela. Un sentiment de tristesse face à ce constat et d'impuissance surtout. c'est une grosse machine qui est<br /> lancée. Ca doit être notre côté destructeur qui est le moteur, ne connaissant plus de grande guerre, on se tue différement, sans se faire de mal en surface. Ca n'engage rien de bon pour<br /> les générations à venir. Tiens, ton com me fait penser à cette chanson :<br /> <br /> <br /> http://www.youtube.com/watch?v=IEexx5BR5eY&feature=fvsr<br /> <br /> <br /> <br />

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